Le 30 novembre dernier, l’auditorium Saint-Pierre des Cuisines accueillait, dans le cadre du festival ByPass, un nouvel ensemble instrumental voué aux musiques de notre temps : Opus Contemporain. Un public heureux et particulièrement jeune a découvert un répertoire plein d’une vitalité et d’une inventivité réjouissantes défendu par des musiciens de haut vol.
Pas moins de sept compositeurs d’aujourd’hui ont contribué à l’établissement d’un programme musical à la fois cohérent et varié, témoignant de l’extraordinaire richesse de la création musicale actuelle. Ce soir-là, le large échantillon de la génération des créatrices et créateurs parmi les plus représentatifs de notre temps se structure autour d’une série d’improvisations sur une partition graphique de Félix Rozen. Trois interventions de six musiciens balisent le cours de ce concert. Chacune d’entre elles s’inspire de la partition graphique de l’artiste plasticien Félix Rozen, constituée de six lignes, une pour chaque musicien. La parenté évidente entre ces trois « actions » joue essentiellement sur un fourmillement sonore qui ponctue donc la succession des pièces de ce beau programme plein de diversité.
La première œuvre qui ouvre cette succession est signée de Georgia Spiropoulos, compositrice tutélaire de cette 8ème édition du Forum ByPass. Pnoes (respiration en grec) est écrite pour un seul instrument à vent. Elle est ici jouée avec maestria par Thomas Barthélémy qui convoque avec talent toutes les ressources sonores et expressives du saxophone. La pièce suivante, intitulée Intersections, de David Hudry, réunit six instrumentistes dont un piano et un marimba. Ils sont ici dirigés avec précision par Jérôme Comte, clarinettiste solo de l’ensemble Intercontemporain. Couleurs et rythme nourrissent tout son déroulement.
Cinq instruments sont requis pour l’exécution de Monstrum de Sasha Blondeau. Construite en arche, cette partition fait émerger le hautbois du silence pour l’y replonger après une agitation lumineuse. Adrien Trybucki est l’auteur de Mikropsia, pièce très originale écrite pour neuf instruments et dirigée par Jérôme Comte. Elle fait référence à la « micropsie », cette altération de la vue dans laquelle des objets sont perçus plus petits qu’ils ne le sont en réalité. La traduction musicale évoque une superposition de miniatures et comme un pointillisme sonore ponctué d’éclats presque lyriques particulièrement évocateurs.
Philippe Hurel est l’auteur de la partition suivante. Ce grand compositeur d’aujourd’hui livre ici sa pièce En spirale, écrite pour son ami Jérôme Comte et exécutée ce soir-là par le dédicataire lui-même. Les trois partie qui constituent cette œuvre d’une effervescence incroyable s’avère d’une exigence absolue en termes de virtuosité et d’accomplissement instrumental. Un jeu à la fois percussif et d’un extrême volubilité est déployé ici par l’interprète. Impressionnant !
Entrelacs de Yann Maresz conclut ce prolifique voyage en terre actuelle. Composée pour six instrumentistes, cette pièce basée sur « l’ondulation des vagues ou la vibration de l’air » est ici dirigée par Jérôme Comte. Elle semble traduire une discussion, une série d’échanges entre les composantes de son déroulement.
Soulignons la qualité et le talent de chacun des membres de ce nouvel ensemble Opus Contemporain dont il faudra suivre avec intérêt les prochaines interventions.
Bénéficiant d’un grand succès auprès d’un public visiblement heureux de la découverte de ce répertoire vivifiant, les artistes sont rappelés avec un enthousiasme justifié. Souhaitons longue vie et légitime soutien à ByPass, ce nécessaire Forum de la Création Musicale !
Serge Chauzy