Suite en Blanc – Serge Lifar –©David Herrero
C’est la Danse qui s’est invitée au Théâtre du Capitole pour les derniers jours de l’année 2023.
Le Ballet National du Capitole nous invite à revenir au siècle dernier avec les grands maîtres de la danse néoclassique : Serge Lifar le franco-russe précurseur, Jerome Robbins l’américain fantaisiste, et Jiři Kylián le tchèque espiègle, pour un programme plein d’humour et de fantaisie. Le programme se construit sur trois œuvres de ces chorégraphes majeurs. Suite en blanc , présenté à l’Opéra de Paris en 1943, après sa création à Zürich, est, parmi les soixante ballets que créa Serge Lifar en trente années de direction du Ballet de l’Opéra, celui qui fut le plus représenté. D’origine russe, formé par Bronislava Nijinska à Kiev, Serge Lifar débute au sein des Ballets Russes de Diaghilev en 1923. Devenu premier danseur il y crée les principaux rôles des ballets de Massine et de Balanchine, et réalise également sa première chorégraphie, Renard, en 1929. En 1930 il s’installe pour 16 ans à l’Opéra de Paris. Renvoyé à la libération en 1945, il y revient en 1947, jusqu’en 1958. Il est un danseur d’une extraordinaire présence et un bon technicien pourvu d’une admirable souplesse et d’une superbe élévation. Dans son rôle de maître de ballet il est l’artisan du renouveau de l’école française et de l’élaboration du style néoclassique fait d’élégance, d’harmonie, de lignes pures et de brio technique. Dans son Manifeste du chorégraphe (1935), il revendique la priorité de la danse sur les autres composantes du spectacle . « Le ballet-dit-il- ne doit pas emprunter son schéma rythmique à la musique » Sur des extraits de Namouna d’Edouard Lalo, Suite en blanc est un ballet blanc, sans argument, « une pièce de danse pure », une œuvre lyrique où se retrouve tout le vocabulaire néoclassique dans des enchaînements de pas, devenu la signature de Lifar. Cette suite de dix études chorégraphiques qui mêle trio, solo, pas de cinq, pas de deux, pour finir en apothéose dans un final où se retrouve toute la troupe, en fait une succession de petits bijoux chorégraphiques qui mettent en valeur les plus belles qualités des danseurs.
Avec Sechs Tänze de Jiři Kylián, l’atmosphère change totalement. Le chorégraphe tchèque nous présente ici six pièces sur la musique des « Six Danses allemandes » de Mozart, un ballet plein d’un humour parfois grinçant, mais toujours pétillant où l’on retrouve l’imagination débordante et charismatique du chorégraphe. Mais comme toujours chez lui, sous la dérision perce la gravité et le questionnement sur notre époque. Alors sous les perruques enfarinées, les robes à paniers, les gestes brusques et les ruptures d’équilibre, il distille l’idée, très mozartienne selon lui, que « nos vies ne sont rien d’autre que des mascarades, des répétitions générales en vue de quelque chose de plus profond et de plus signifiant ».
Jiří Kylián a commencé sa carrière de danseur à l’âge de neuf ans, à l’École du Ballet national de Prague. En 1962, il est admis comme étudiant au Conservatoire de Prague. Il quitte Prague en 1967 lorsqu’il reçoit une bourse d’études pour la Royal Ballet School de Londres. Invité par John Cranko au Ballet de Stuttgart, il y fait ses débuts de chorégraphe. Après la création de trois ballets pour le Nederlands Dans Theater (NDT), il en devient le directeur artistique en 1975 jusqu’en 2004, mais reste associé à la compagnie en tant que chorégraphe maison. En avril 2018, il est élu membre associé étranger de l’Académie des Beaux-Arts. Il affirme à cette occasion : « la danse révèle l’état de notre être, elle est certainement notre mode de communication le plus personnel » . Son style énergique, visuel et musical à la fois, est fondé sur de solides bases néoclassiques, revisitées de manière contemporaine.
La soirée se terminera par The Concert, de Jerome Robbins. Le chorégraphe issu d’une famille russe émigrée reçoir une formation très complète : danse classique et moderne, cours de théâtre, de piano et de violon. Dès 1939, il se produit dans des comédies musicales chorégraphiées par Balanchine. En 1940 il entre à l’American Ballet Theater de New York et y chorégraphie son premier ballet, Fancy Free, en 1944 sur une musique de Léonard Bernstein, ballet qui lui ouvre les portes de Broadway et du cinéma. En 1961 il coréalise avec Robert Wise le célébrissime West Side Story, film qui recevra 10 Oscars et qui fait connaître son nom au grand public. En 1948, il rejoint Balanchine au New York City Ballet et en devient le directeur adjoint jusqu’en 1958, maître de ballet de 1983 à 1989. Il démissionne peu après, mais continue à diriger ses propres ballets. Son œuvre compte plus d’une trentaine de ballet et de comédies musicales. Dans The Concert qui fait son entrée au répertoire du Ballet National du Capitole, Jerome Robbins signe une pièce fantasque, débordante d’un humour ravageur. Dans ce ballet burlesque, le chorégraphe nous décrit l’état d’esprit de la bonne société venue écouter un concert dédié à Chopin. A l’atmosphère feutrée, un peu guindée et cérémonieuse, succède un final totalement délirant et surréaliste, où l’on retrouve l’inénarrable Mistake Waltz, un bijou d’humour toujours accueilli par les éclats de rire du public.
C’es l’Orchestre National du Capitole qui accompagnera le ballet sous la baguette de Philippe Béran. The Concert sera également accompagné par Yannaël Quenel, pianiste accompagnateur du la Compagnie .
Comme à l’accoutumée, plusieurs évènements auront lieu autour du spectacle.
Danse à la Cinémathèque présentera, le jeudi 14 décembre, à 21h, le West Side Story de Jerome Robbins et Robert Wise.
Conférence : Florence Poudru donnera une conférence sur « Lifar, Robbins, Kylián : hommage à l’humour ». samedi 16 décembre à 18h, Théâtre du Capitole.
Carnet de Danse : samedi 16 décembre à 19h30 au Théâtre du Capitole .
Cours Public : dimanche 17 décembre, à 12h15, Théâtre du Capitole
Réservation : www.opera.toulouse.fr – 05 61 63 13 13
Annie Rodriguez